lundi 7 novembre 2011

Daniel Oppenheim, L'enfant très malade approché dans ses dessins

Daniel Oppenheim, L'enfant très malade approché dans ses dessins, éditions de l’Olivier, mai 2011, 128 pages.
« […] Autre particularité du livre, bien que son titre annonce qu’il va s’agir de dessins faits par des enfants, aucun dessin ne s’y trouve ou interprété ou mis en illustration d’un propos théorique […] se justifie par l’objet même de l’ouvrage qui n’est pas de nous éclairer sur telle ou telle interprétation, mais de mettre l’accent au contraire sur l’attitude profonde que l’analyste doit adopter pour saisir l’essentiel du propos qui lui est adressé. S’il ne s’agit pas d’une innovation, sa position constitue un rappel nécessaire, rappel qui s’applique bien sûr à l’utilisation du dessin dans l’approche psychanalytique mais également à tous les outils utilisés que l’on désigne habituellement sous le terme d’objets de la médiation thérapeutique. (cf. le livre Les médiations thérapeutiques, Érès 2011 sous la direction d’Anne Brun)
Enfin, il précise, sans doute trop succinctement, sa place vis-à-vis des médecins, une place qui n’est pas la première. Ce n’est pas de lui dont dépend la guérison. Cette guérison, chacun l’espère et c’est elle qui centre le transfert en direction des médecins et du personnel soignant. Lui, il doit justifier de sa place auprès des parents, auprès de l’enfant et aussi auprès du personnel soignant lui-même. Ce rapport au « médical en tant qu’objet », réflexion si bien exposée dans les années 70 par le regretté Pierre Benoit […] Daniel Oppenheim insiste sur la nécessité non seulement de prendre en compte le dessin, mais d’être attentif aux gestes de l’enfant au décours de son dessin. Cet accompagnement qui respecte le temps de l’enfant doit aussi être à l’écoute des commentaires qu’il fait de son dessin, de ses ratures, des hésitations de son trait, de la répétition des motifs, de leur place dans la feuille, des débordements éventuels hors de cet espace blanc laissant des traces sur la table. C’est un point certainement qui distingue l’approche de l’auteur de celle de Françoise Dolto, elle plus encline à interpréter le dessin en dehors de son geste.
Une autre position originale soutenue par Daniel Oppenhein, consiste dans la possibilité pour l’enfant de reprendre un dessin fait antérieurement. Il peut le regarder et même le modifier, lui adjoindre tel ou tel détail, changer sa couleur, etc. Le dessin devient alors un témoin d’une histoire qui s’inscrit dans le temps, et pas l’inscription d’un instantané, d’un arrêt sur image pourrait-on dire. Le temps du dessin est le temps du travail avec le psychanalyste, le temps de la relation avec l’analyste qui est celui de l’hospitalisation, mais qui peut se prolonger bien au-delà.
L’interprétation du dessin par l’analyste n’est jamais assurée, toujours proposée. C’est là encore un bien utile rappel en particulier pour les moins expérimentés de nos collègues. Explorateur en terre inconnue et fragile, le psychanalyste doit montrer d’abord à l’enfant dans quelle position il se trouve vis-à-vis de lui, c’est-à-dire être à son écoute, même s’il ne parvient pas à saisir tout ce que l’enfant souhaite exprimer et que sans doute, ils ignorent tous deux. Il n’en reste pas moins que cette attitude assure l’enfant d’une présence dont l’appui lui est nécessaire. Le dessin apparaît alors pour ce qu’il doit être : un espace transitionnel entre le psychanalyste et l’enfant. Il ne s’agit pas d’entrer ici dans le jeu des devinettes, jeu auquel parfois l’enfant lui-même invite le psychanalyste; le dessin de l’enfant est présence de l’enfant dans le dessin « de son corps, de sa voix, de son moindre geste » référence ici tant à Françoise Dolto qu’à Fernand Deligny […] »
Laurent Le Vaguerèse
http://www.oedipe.org/fr/prixoedipe/2012/oppenheim
http://www.editionsdelolivier.fr/

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